COMMENT BRUNO BOUDIGUET A REDÉCOUVERT LES "BLANCS DU 13 MAI" :
Bruno Boudiguet raconte comment, à l’occasion d’un voyage effectué au Rwanda au cours de l’été 2012, il est retombé sur les "Blancs du 13 mai" par un canal totalement différent de celui qui a conduit Serge Farnel à être informé de leur présence ainsi que de leur participation au grand massacre anti-Tutsi. Plus de détails ICI.
ENTRETIEN INDIVIDUEL AVEC AARON KABOGORA (RESCAPÉ, UN DES CHEFS DE LA RÉSISTANCE) :
Témoignage d'Aaron Kabogora (rescapé, un des chefs de la résistance) recueilli par Bruno Boudiguet le 20 août 2012 au centre de santé de Gititi
Interprète : André Gakwaya Vérification et nouvelle traduction (sous-titres) : Ignatiana Mukarusanga
Résumé : Les attaques ont eu lieu à plusieurs reprises. Des Interahamwe viennent d'un peu partout, par divers moyens. Les Blancs aussi sont parfois présents. Bien avant la grande attaque, des Blancs viennent. Ils viennent à l'approche de la grande attaque. Aaron les voit lors de certaines attaques, sans savoir si ce sont eux qui les préparent. Aaron ne saurait pour autant les identifier. Il y a l'attaque du 13 et du 14 mai, au moment où des bus arrivent. Les Blancs n’étaient pas visibles que le 13 mai, mais participaient également à d'autres attaques. Aaron dit les avoir vus dans les attaques précédant la grande attaque. Il les voit pendant les massacres sans savoir s’ils ont eux-mêmes massacré le jour de la grande attaque. Cependant les Blancs sont alors bien là à cette époque. Aaron n’a pas parlé de la présence des ces Blancs en dehors des enquêteurs qui lui posent la question, considérant qu’ils n’auraient pas pu porter plainte ou témoigner contre ces Blancs sans connaître leur identité. Aussi n’ont-ils pu porter plainte et faire un procès qu'aux Interahamwe qu’ils connaissent. Même à l’occasion des témoignages des Gacaca, ils n'ont pu dire que les Blancs étaient présents pendant les tueries étant donné qu’ils ne pouvaient pas savoir quand et où aurait lieu le procès contre eux.
ENTRETIEN INDIVIDUEL AVEC SEMI BAZIMAZIKI (MILITAIRE GÉNOCIDAIRE) :
Témoignage de Semi Bazimaziki (militaire génocidaire) recueilli par Bruno Boudiguet le 23 août 2012 au Home Saint-Jean de Kibuye (Rwanda)
Résumé : Semi Bazimaziki a 23 ans au moment du génocide. Il est né dans l'actuel secteur de Mubuga, cellule de Murangara, dans l’umudugudu (village) de Nyabitare, district de Karongi. Semi est militaire. Il fait, pendant l’opération Noroît, partie d’unités combattantes où les militaires français travaillent alors main dans la main avec les officiers rwandais. Semi devient caporal dans la compagnie QG, au sein de l'Ecole supérieure militaire (ESM), école fréquentée par des soldats français. Il s’y trouve le soir de l’attentat [6 avril]. Il voit alors à Kigali des militaires français circuler à grande vitesse à l'aide de petites Jeeps, donnant bientôt l’impression de contrôler eux-mêmes la situation par rapport aux officiers rwandais avec qui ils se trouvent, contrôlant tous les mouvements, supervisant et commandant toutes les activités, en somme tenant tout entre leurs mains. Au lendemain matin de l’attentat, des officiers français arrivent en Jeeps à l’ESM et entrent dans une salle de réunion. À Kanombe, les militaires rwandais n'ont plus la moindre autorité à exercer au niveau du contrôle de l'aéroport, étant donné que ce sont désormais les Français qui le contrôlent, et ce même après l'évacuation des expatriés. Après le retour massif des occidentaux [15 avril], Semi continue à voir des militaires français, tous les mouvements que font les Forces armées rwandaises étant faits conjointement avec eux. Dans les premiers jours du mois de mai, blessé au niveau du ventre, Semi demande une permission afin de quitter Kigali alors menacée. Ne sachant pas où se faire soigner, il leur explique que chez lui, à Kibuye, il va pouvoir avoir des soins. Il obtient l’autorisation de s’y rendre. Il ne va pas directement à l'hôpital, mais chez son frère, alors assistant bourgmestre à Gishyita, chez qui il vit. Quand il arrive dans la région de Kibuye, Semi voit des Blancs. Il se rend d'abord à la mission de pacification locale. La grande attaque à Bisesero a lieu le 13 et le 14. Le bourgmestre local dit à la population : « Les militaires blancs qui sont avec nous sont des Français venus nous soutenir. » La population monte le 13 en direction de Bisesero, Semi y compris, tout ce monde étant accompagné de Français vêtus de tenues militaires en général semblables aux tenues militaires rwandaises. Une fois à Bisesero, les Français se séparent des populations, prennent leurs fusils, montent sur une colline, en atteignent le sommet, après quoi ils appuient les tueurs en tirant sur la population. C’est alors que l'autre population avance et machette les blessés. L'arsenal militaire des Français comprend une mitrailleuse ainsi que des mortiers identiques à ceux que Semi avait l’habitude de voir pendant la guerre. Il arrive que les Tutsi se lèvent et avancent en direction de leurs assaillants jusqu’à atteindre une certaine supériorité leur permettant de les pourchasser. C'est alors que les Français se saisissent de leur mitrailleuse, de leur fusil, après quoi ils tirent sur les Tutsi afin qu’ils ne l’emportent pas sur les tueurs. Afin de ne pas tuer des Hutu en même temps, les militaires français sont alors aiguillés par des officiers rwandais qui leur indiquent les positions exactes où il leur faut tirer. Semi voit ensuite d’autres Français [ceux de Turquoise] arriver, quelques semaines plus tard, plus nombreux et qui ne sont pas ces Français qui sont, eux, venus le 13 et le 14 mai. Ceux qui sont partis pour la grande attaque à Bisesero étaient une vingtaine. À un moment donné, Semi voit cette vingtaine - ou même trentaine - de Français basés à Gishyita recevoir leurs compagnons d'armes en provenance de Cyangugu, rencontrer les membres de la grande opération humanitaire, que ce soit à Gishyita, à Mubuga, ou dans tout autre centre.
ENTRETIEN INDIVIDUEL AVEC JEAN NGARAMBE (PAYSAN GÉNOCIDAIRE) :
Témoignage de Jean Ngarambe (génocidaire) recueilli par Bruno Boudiguet en 2012 à Mubuga (Rwanda)